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Armand Heitz raconte le millésime 2019 en Bourgoggne

Le millésime 2019

Publié par Armand Heitz le

Les millésimes se suivent et ne se ressemblent pas. Après un millésime 2018 ultra simple, j’ai eu beaucoup de mal à imaginer que la nature serait moins facile a gérer en 2019.

Coup de froid d’emblée

Alors que les bourgeons sont à peine en pointe verte, un gros coup de froid est annoncé en Bourgogne. Chambres d’agriculture, BIVB, COOP, nos chers (je parle bien d’un point de vue monétaire) conseils techniques se voulaient rassurant : « la gelée sera petite et la vigne n’est pas assez poussée ! » N’étant jamais mieux servi que par soi-même, nous avons décidé à Chassagne de ne pas suivre leurs conseils et de se tenir prêt à intervenir avec un éventuel brûlage de paille. 

Gel en Bourgogne printemps 2019 vignes bourgeons vert

Dans la nuit du 5 avril, le thermomètre va vite chuter. Le temps était très humide et le vent du nord participait encore plus à la sensation de froid. Notre fumée de paille ne va servir à rien à cause du vent. Du fait du peu de risque annoncé par nos conseils, beaucoup de vignerons n’avaient pas encore sorti leurs bougies.

Les dégâts sur le chardonnay sont importants. Le pinot noir qui était un peu moins avancé phénologiquement a également souffert mais les dommages étaient plus difficiles à voir. Pour un paysan, il est toujours frustrant de commencer une saison par un coup de gel ! La plante a subi un fort stress et le potentiel de récolte est déjà amputé.

Conditions climatiques

Le millésime 2019 en Bourgogne n’a pas été très précoce, la floraison a eu lieu début juin. Pendant la fleur, la météo était fraîche et cela va entraîner de la coulure sur le chardonnay. L’été 2019 est caniculaire et avec seulement 226 mm de pluie du 1er avril au 30 septembre, la saison aura été encore plus sèche que 2003 !

Floraison vignes Bourgogne millésime 2019 fraîcheur

Depuis l’été 2015, nous subissons les étés les plus chauds et secs jamais connus en Bourgogne. Il est déplorable de voir que malgré l’urgence climatique, les plus gros pollueurs de la planète continuent avec le soutien de nos gouvernements à détruire notre planète. Mais bon ! Tant qu’ils continuent à boire du Bourgogne, pourquoi s’inquiéter ?

Maladies et interventions

L’autre défi de ce millésime aura été la forte pression de l’oïdium. La cadence de traitements de l’agriculture biologique est hebdomadaire et les raisonnées interviennent tous les 10 à 12 jours. Sauf que le soufre, avec la répétition des traitements et des fortes chaleurs, peut entraîner des grillures sur les raisins.

Dans la nature lorsqu’un système est équilibré l’intervention de l’Homme est quasi inutile. Au vu du nombre d’opérations que nous devons effectuer sur nos vignes, nous pouvons clairement en conclure que nos vignes ne sont plus en adéquation avec leur environnement.

Grappe de vigne chardonnay Bourgogne millésime 2019

Je ne comprends pas que nous préférions dépenser notre argent à allumer des bougies et à utiliser des produits chimiques pour continuer à les cultiver alors que nous pourrions simplement utiliser des cépages sélectionnés naturellement et mieux adaptés au contexte actuel. La raison est simple : l’INAO et l’IFV sont deux cadavres administratifs. C’est une honte pour leurs pères fondateurs. Aujourd’hui, ces organismes ne sont plus capables de rien si ce n’est dégrader l’image de nos prestigieux terroirs.

Style du millésime

Les conditions climatiques déterminent toujours le style du millésime. Avec des températures assez hautes et peu de pluie, la récolte va murir vite et nous décidons d’attaquer les vendanges avec les blancs le 9 septembre. La vendange était riche en acide tartrique, ce qui est plutôt bon car l’acide malique avait fondu au soleil. Avec des teneurs en sucre parfois supérieur à 13% vol., l’acide tartrique a également pour effet de rééquilibrer le vin.

Millésimen2019 Armand Heitz Meursault

Début 2021, les vins sont en bouteilles et malgré des conditions peu communes pour la Bourgogne, les personnalités de chaque terroir auxquelles nous sommes habitués ressortent bien. Cela me rassure concernant la capacité de nos vignes à pouvoir s’adapter à ces changements climatiques. Au domaine, nous ne voulons pas nous reposer sur nos lauriers. Notre souhait est de nous rapprocher toujours plus d’un modèle le plus vertueux possible afin de réparer les erreurs de nos industriels.

Armand Heitz

 

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